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  • Alexandra Joutel

Synchronicités : une question de temps ?

Dernière mise à jour : 3 nov. 2019


Dans mon article du 28/12/2018, j’expliquais à partir d’exemples ce qu’est une synchronicité selon Jung. Allons plus loin aujourd’hui, avec une hypothèse issue de la physique moderne. Il sera question de causalité et de réversibilité du temps. Accrochez vos ceintures !


On définit les synchronicités comme des coïncidences signifiantes sans lien de cause à effet. Elles se produisent spontanément, parfois en série, et pourtant il n’y a aucun lien apparent entre elles, sinon une similarité symbolique qui fait sens uniquement pour celui qui les observe.


Citons un exemple célèbre rapporté par Jung. L’une de ses patientes, dont le travail thérapeutique patinait depuis quelques temps en raison de son esprit trop cartésien, lui raconte un jour un rêve qu’elle venait de faire, où on lui offrait un scarabée doré. Pendant que Jung et sa patiente échangent autour de ce rêve, un bruit se fait soudain entendre à la fenêtre du cabinet, comme si quelque chose avait tapé dans le carreau. Jung se lève, ouvre la fenêtre et découvre… un scarabée doré. Il le montre et l’offre à sa patiente, qui n’en revient pas. Perturbée dans son rationalisme, la patiente a accepté d’ouvrir sa vision des choses et la cure a pu reprendre son cours.


Quel est le lien causal entre le rêve de cette patiente et l’événement qui s’est produit dans le cabinet ce jour-là ? En apparence et selon les lois de la physique, aucun. Les synchronicités seraient donc des phénomènes acausaux, relevant d’un autre principe où psyché et matière seraient liées. C’est en tout cas ce qu’en ont conclu Jung et le physicien Wolfgang Pauli dans leur ouvrage commun paru en 1952 : Synchronicité comme principe de connexions a-causales.


Mais les synchronicités sont-elles vraiment un phénomène affranchi de tout lien de causalité ?


En février 2010, le physicien et ingénieur de recherche au CNRS Philippe Guillemant jette, si l’on peut dire, un pavé dans la mare, en nous invitant à revisiter la question dans un ouvrage intitulé La Route du temps (éditions Le Temps présent), dont une version revue et augmentée est parue en 2014. Son hypothèse de travail est pour le moins audacieuse, voire révolutionnaire : et si le temps était réversible et s’écoulait en réalité dans les deux sens ? Pas seulement du passé vers le futur, mais également du futur vers le passé. Comme il l’explique lui-même, « certains phénomènes physiques semblent se rebeller contre le principe fondamental de la réversibilité et (…) selon la physique statistique, le temps est irréversible ». Mais, poursuit-il, « sur ce point, les spécialistes restent dubitatifs et partagés, car les équations fondamentales de la physique sont parfaitement réversibles, c’est-à-dire symétriques par rapport au temps. » Partant de là (et pour faire court), la cause des synchronicités ne se trouverait-elle pas dans le futur, tandis que leurs effets nous parviendraient dans le présent ? Encore faut-il ajouter qu’il n’existe pas, selon Guillemant, un futur unique et inamovible, mais un champ de futurs possibles, sachant que nous n’en actualiserons qu’un, en fonction de notre disposition d’esprit présente et de nos conditionnements…


Je ne peux résumer ici le livre de Philippe Guillemant et, n’étant pas physicienne, je ne peux développer plus loin sa « théorie de la double causalité », dont le postulat bouscule fortement notre conception habituelle des choses.


Ce que l’on peut en retenir cependant, et c’est là une avancée importante par rapport aux observations de Jung et de Pauli, c’est que l’on peut « créer » des synchronicités. Soyons précis : pas les créer de toute pièce, mais demander à ce qu’elles se produisent dans un délai donné, en posant une intention. Impossible, en revanche, de savoir quand et comment elles se produiront, cela reste le fruit du « hasard » et échappe à notre volonté. On constate d'ailleurs qu'elles se produisent quand nous lâchons prise par rapport à notre intention.


Créer des synchronicités serait, en fait, utiliser des boucles de rétroaction temporelles, partant du présent et allant dans le futur pour revenir dans le présent, à l’image d’un ouroboros (notre photo). Concrètement : je pose une intention dans le présent, celle-ci active un futur potentiel où cette intention est déjà réalisée et, pour me guider, je reçois dans mon présent des informations du futur sous formes de synchronicités (mais peut-être aussi d’intuitions ou d’idées créatrices). Celles-ci me servent alors de balises pour aller vers le futur choisi et pas vers un autre.


Faisant le lien entre les travaux de Philippe Guillemant et ses expériences vécues auprès de chamanes amazoniens, l’ethnobotaniste Romuald Leterrier a mis en place des ateliers de rétrocausalité, dont le but est d’apprendre à créer des synchronicités. Et les résultats sont étonnants. Il les rapporte dans un ouvrage récent, co-écrit avec le journaliste scientifique Jocelin Morisson et préfacé par Philippe Guillemant : Se souvenir du futur – Guider son avenir par les synchronicités (éditions Guy Trédaniel – février 2019). Aussi riche que passionnant, ce livre est une synthèse pointue de la recherche actuelle en matière de temps et une réflexion à deux voix sur toutes les implications qu’ouvre le principe de rétrocausalité, notamment sur le plan thérapeutique. Et comme cela ressemble fort à ce que les amateurs de New Age ont baptisé « loi d’attraction », les deux auteurs en profitent pour faire un sérieux recadrage sur la mauvaise utilisation d’un principe juste au départ, mais à la finalité détournée. Car l’éthique y a sa part et notre rapport aux autres et au monde aussi.

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