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  • Alexandra Joutel

La voie royale qui mène à l'inconscient: Freud vs Jung

Dernière mise à jour : 11 nov. 2019

Freud a dit que « l’interprétation des rêves est la voie royale qui mène à la connaissance de l’inconscient » (L'interprétation des rêves - 1900). Également convaincu de cette affirmation, Jung aborde cependant les rêves d’une toute autre manière…


Le problème, entre Freud et Jung, est qu’ils n’envisagent pas du tout l’inconscient de la même façon.


Pour Freud, l’inconscient n’est que le contenant des désirs refoulés de l’individu, car moralement prohibés par son Moi conscient : désirs sexuels interdits, désirs d’agressivité réprimés, etc. Vu sous cet angle, l’inconscient s’apparente à une espèce de poubelle dans laquelle nous jetons nos déchets psychiques personnels… Du coup, nos rêves ne sont que l’expression de ces désirs refoulés. Analyser ses rêves permet alors d’en prendre conscience et d’éviter un passage à l’acte dans notre vie diurne.


Jung ne conteste pas cette possible interprétation de certains rêves. Mais pour lui, la grande majorité des rêves parle totalement d’autre chose et vise un autre but. Car dans la vision jungienne, l’inconscient est bien plus vaste et plus riche qu’une simple poubelle. Et surtout, l’inconscient précède le conscient.


En effet, si l’on suit Freud, le conscient précède l’inconscient, puisque l’inconscient n’est qu’un produit du conscient. Pour faire simple : on vit notre vie et quand un désir dérangeant ou inapproprié apparaît (et ce, dès le plus jeune âge), hop ! on fabrique une poubelle pour le jeter dedans. Et les rêves permettent de vider la poubelle, en prenant conscience de son contenu. La question qui demeure est : pourquoi, une fois la poubelle vidée, continue-t-on de rêver ? La réponse logique serait de dire que nous continuons à produire des désirs « interdits » tout au long de notre vie… Et tel Sisyphe et son rocher, nous n’en finissons jamais de remplir et de vider la poubelle. Triste destin !


Le point de vue de Jung est radicalement différent. Pour lui, l’inconscient n’est pas juste une poubelle de notre conscient, il est surtout la matrice d’où émerge petit à petit notre conscient. Car cet inconscient n’est pas que personnel, mais également collectif et transgénérationnel. Il contient non seulement nos facettes refoulées (nos « ombres », dit-on en langage jungien, et il ne s’agit pas tant ici de nos désirs prohibés que de nos potentiels non exprimés ou de nos autres possibles pas toujours admis par le conscient), mais aussi tous nos instincts et les schèmes de comportement adoptés par l’humanité depuis ses origines. Ce que Jung a appelé les « archétypes ».


Nous naissons tous avec des schémas collectifs, actuels ou hérités de génération en génération, qui conditionnent notre psychisme et nous font adopter des comportements archétypiques inconscients, ce qui nous empêche d’être véritablement nous-mêmes. Le but de notre vie est de se différencier de cet inconscient, de sortir de la matrice, en devenant de plus en plus conscient, en élargissant sans cesse notre champ de conscience et en intégrant nos ombres, afin de devenir pleinement nous-mêmes. Jung a donné le nom d’« individuation » à ce processus. Et c’est en cela que les rêves nous aident : en révélant à chacun dans quels rets inconscients il est pris et en indiquant le chemin à suivre pour en sortir.


Les rêves prennent alors une tout autre valeur que chez Freud : ils deviennent de précieux guides intérieurs sur un chemin initiatique qui nous mène vers nous-mêmes et vers notre unité profonde. Ils ont également, au passage, de puissants effets thérapeutiques, puisque ne pas être nous-mêmes ou rester intérieurement divisé tend à créer des névroses, voire des maladies somatiques.


On voit ainsi comment, en étant tous les deux d’accord pour dire que les rêves sont « la voie royale qui mène à la connaissance de l’inconscient », Freud et Jung n’aboutissent absolument pas au même endroit.


Photo : David Mark / Pixabay

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